La phagothérapie suscite à nouveau l’intérêt

publié le 27 Nov, 2024

Des scientifiques de l’Institut Pasteur, de l’Inserm, de l’AP-HP et de l’Université Paris Cité ont développé un outil susceptible de choisir le meilleur cocktail de bactériophages possible pour un patient donné.

« La phagothérapie a été inventée par le chercheur pasteurien Félix d’Hérelle dans les années 1920 puis a été abandonnée avec l’essor des antibiotiques à la fin des années 1930, beaucoup plus simples et économiques à fabriquer et à utiliser. Aujourd’hui, seuls quelques pays de l’Europe de l’Est, comme la Géorgie, utilisent encore la phagothérapie, tandis que dans les pays occidentaux, des phages à “large spectre” sont utilisés ponctuellement de façon compassionnelle pour traiter des infections chroniques multirésistantes aux antibiotiquesquand plus aucun médicament autorisé n’est efficace, rappelle Baptiste Gaborieau, co-premier auteur de l’article, médecin réanimateur à l’Hôpital Louis Mourier (AP-HP) et chercheur dans le laboratoire IAME (Université Paris Cité-Inserm). Depuis une vingtaine d’années, grâce à sa promotion par l’OMS et plus récemment la mise en place d’essais cliniques notamment européens, la phagothérapie suscite à nouveau l’intérêt. »

C’est ainsi que des scientifiques de l’Institut Pasteur, de l’Inserm, de l’AP-HP et de l’Université Paris Cité ont développé un nouvel outil susceptible de choisir, de façon simple et efficace, le meilleur cocktail de bactériophages possible pour un patient donné. Pour cela, ils ont élaboré et entraîné un modèle à base d’intelligence artificielle capable de sélectionner sur mesure des bactériophages en se basant uniquement sur le génome des bactéries ciblées.

La première étape a consisté en la création d’une base de données de qualité avec d’un côté 403 souches de bactéries Escherichia coli et de l’autre 96 bactériophages. Un travail qui aura nécessité plus de deux ans d’efforts. « Nous avons mis en contact les phages avec les bactéries en culture et observé quelles bactéries étaient tuées. Nous avons étudié 350 000 interactions et réussi à identifier, au niveau du génome des bactéries, les caractéristiques susceptibles de prédire l’efficacité des phages, résume Aude Bernheim, principale autrice de l’étude et responsable du laboratoire Diversité moléculaire des microbes à l’Institut Pasteur.

Grâce à cette analyse précise et complète des mécanismes d’interaction entre les bactéries et les phages, les bio-informaticiens de l’équipe ont pu concevoir un programme d’intelligence artificielle optimisé et efficace.

Après plus de deux ans de conception et d’entraînement, l’IA a ainsi été capable de prédire correctement l’efficacité des bactériophages face aux bactéries E. coli de la base de données dans 85 % des cas, simplement en analysant l’ADN des bactéries. 

Cette méthode, facilement utilisable dans les laboratoires de biologie hospitalière, ouvre la voie dans les années à venir à une sélection personnalisée et rapide de traitements par bactériophages en cas de diagnostic d’infection bactérienne à Escherichia coli très résistants aux antibiotiques. 

Les résultats de ces travaux ont été publiés le 31 octobre 2024 dans la revue Nature Microbiology. 

Source : La Gazette du Laboratoire, Institut Pasteur

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