Traitement des maladies rares

publié le 4 Mar, 2025

Dans le domaine des maladies rares, le repositionnement de molécules a le vent en poupe alors que la thérapie génique semblait être la voie d’avenir.

Le développement d’un nouveau médicament est un processus long et coûteux : plusieurs dizaines voire centaines de millions d’euros et quinze années de recherche et développement en moyenne. C’est pourquoi de nombreux scientifiques et industriels se tournent vers le repositionnement. Un gain de temps et des économies non négligeables en perspective puisque les conditions d’administration et les effets indésirables sont au moins en partie déjà connus.

Voici deux exemples de maladies rares pour lesquels les patients ont pu parvenir à une rémission durable grâce au repositionnement d’un traitement d’une autre maladie.

Le premier exemple est décrit dans une correspondance au New England Journal of Medicine (NEJM). Il suggère de nouvelles voies de recherche pour identifier des traitements possibles de maladies rares. Un patient souffrant d’une forme grave de maladie de Castleman, une maladie rare hématologique, a pu parvenir à une rémission durable grâce à un repositionnement d’un traitement de maladies inflammatoires, l’adalimumab.
D’un côté, en comparant 26 patients souffrant de cette forme la plus grave de maladie de Castleman (ou iMCD-TAFRO) et 15 contrôles non malades, ils ont utilisé une approche associant des analyses transcriptomiques et protéomiques sur des échantillons sériques et des travaux in vitro sur des lymphocytes.
D’un autre côté, ils ont adopté une approche de machine learning en utilisant une intelligence artificielle (IA) nommée RTX-KG2 qui a été entraînée pour rechercher, à partir de 70 sources d’information biomédicales, quels médicaments déjà existants pourraient avoir une bonne probabilité d’efficacité en traitement de la maladie de Castleman.
Ces deux approches ont convergé. L’approche omique a montré qu’il y avait une augmentation de la production de la cytokine TNF chez les patients malades. L’IA a de son côté suggéré que pourrait être efficace contre cette maladie, outre des anti-IL-6 comme le siltuximab déjà autorisé, un anti-TNF, l’adalimumab.
Les chercheurs l’ont administré à un patient souffrant d’iMCD-TAFRO ayant eu de multiples poussées et récidives, en échec après de nombreux traitements et qui se préparait à entrer en établissement de soins palliatifs. Ce traitement par adalimumab a induit une rémission qui dure depuis deux ans. La validité de l’inhibition de la voie du TNF en traitement de cette forme grave de maladie de Castleman nécessite maintenant d’être confirmée dans de larges cohortes.

Le deuxième exemple date de 2015. Un néphrologue a pris en charge un patient souffrant d’une insuffisance rénale chronique doublée d’un syndrome de Cloves : une maladie rare, responsable d’excroissances disgracieuses sur tout le corps, habituellement traitées par une chirurgie mutilante. 
« Elles sont dues à une mutation d’un gène impliqué dans la croissance cellulaire. Je me suis aperçu qu’elle était très présente en cancérologie. Puis j’ai découvert qu’un laboratoire menait des essais chez des femmes atteintes de cancer du sein en ciblant cette mutation. Après de nombreuses tractations, ce médicament est prescrit en 2016 à titre compassionnel à mon patient », relate le Pr Canaud. Rapidement la maladie recule de façon spectaculaire.
Un essai, mené ensuite sur 19 enfants et jeunes adultes, est concluant : ils présentent une amélioration nette de leurs difformités et des symptômes associés, alors que leur vie n’était que souffrance. Cette découverte vaudra à ce chercheur français une pléiade de prix prestigieux à travers le monde.

Dans le domaine des maladies rares, le repositionnement de molécules a le vent en poupe alors que la thérapie génique semblait être la voie d’avenir. « Elle représente des coûts colossaux pour chaque patient traité. De plus, ce serait une erreur de croire que les maladies rares sont toutes accessibles à la thérapie génique, même si dans plus de 80 % des cas, elles sont d’origine génétique. Corriger le gène défectueux n’est pas forcément la solution. Aujourd’hui, les petites molécules chimiques restent davantage utilisées que la thérapie génique », explique le Pr Nicolas Lévy, directeur médical et du développement clinique en neurologie dans le groupe Servier.

« […]La thérapie génique restera une arme dans l’arsenal thérapeutique des maladies rares, pas nécessairement l’arme absolue », soutient Serge Braun, directeur des programmes neuromusculaires du Généthon. À l’heure où des millions d’enfants et d’adultes attendent encore un traitement, aucune piste ne doit être négligée.

Source : TIC PHARMA, Le Figaro Santé

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