Pour surmonter les obstacles rencontrés lors l’utilisation de cellules souches (migration, mort prématurée), une équipe Inserm propose de les encapsuler dans un microgel à base d’alginate.
L’arthrose est la maladie articulaire la plus répandue. Si des traitements symptomatiques apportent un certain soulagement aux personnes concernées, il n’existe actuellement aucun moyen de préserver les tissus une fois le processus engagé. Toutefois, des chercheurs étudient depuis quelques années la possibilité d’utiliser des cellules souches pour protéger le cartilage. Ils s’intéressent en particulier aux cellules souches mésenchymateuses, qui peuvent facilement être isolées à partir de tissu adipeux.
Injectées dans l’articulation malade, ces cellules souches ne prennent pas la place des cellules détruites par l’arthrose, mais elles produisent des facteurs de croissance qui favorisent la survie des cellules encore en place. Elles ont en outre un effet immunorégulateur, qui réduit l’inflammation.
Plusieurs études ont prouvé l’intérêt de cette approche thérapeutique chez l’animal et chez l’humain, avec un ralentissement de la destruction tissulaire et un soulagement de la douleur. Mais ces travaux soulignent aussi qu’il est encore nécessaire d’améliorer cette technique pour espérer en obtenir un bénéfice significatif et à long terme. L’utilisation des cellules souches se heurte en effet à deux obstacles majeurs : la majorité des cellules souches meurent rapidement après l’injection, et certaines migrent en dehors de l’articulation.
À l’université de Nantes, pour remédier à ce problème sans avoir à multiplier des injections douloureuses, risquées et onéreuses, le groupe de Catherine Le Visage, directrice de recherche Inserm, propose d’encapsuler les cellules souches dans un microgel. L’idée est de les confiner sur le site d’injection tout en préservant leurs atouts.
Les chercheurs ont opté pour une substance appelée « alginate », un polymère extrait d’algues brunes déjà utilisé en médecine dans des pansements, et expérimenté pour encapsuler d’autres types de cellules, notamment pancréatiques, pour produire de l’insuline et lutter contre le diabète. Peu coûteux et biodégradable, il forme, en présence de calcium, un réseau gélifié et perméable qui ne présente pas de risque connu pour la santé. Les chercheurs l’ont utilisé pour obtenir des particules d’environ 200 μm qui contiennent chacune une vingtaine de cellules souches. Concrètement, une solution d’alginate qui contient des cellules souches est déposée dans des puits de forme et de taille prédéfinies, puis la solution est gélifiée par ajout de calcium. Une fois les cellules ainsi piégées dans le gel, les microparticules sont démoulées.
Des expériences conduites in vitro et in vivo chez l’animal ont montré que l’encapsulation n’entrave pas la survie des cellules, ni le relargage des facteurs à action thérapeutique qu’elles produisent. En outre, dans un modèle de lapin arthrosique, l’injection d’une dose unique de cellules souches mésenchymateuses encapsulées a réduit la perte de cartilage pendant au moins 12 semaines. Une première étape préclinique encourageante. « La poursuite des travaux, y compris avec d’autres modèles animaux, va nous permettre de savoir combien de temps le bénéfice persiste et si l’amélioration fonctionnelle est satisfaisante », conclut Catherine Le Visage.
Source : INSERM